La pollution de l’air, à l’intérieur des locaux comme à l’extérieur, est un problème majeur de santé environnementale touchant aussi bien les pays à revenu faible, intermédiaire ou élevé.
En 2016, on estimait à 4,2 millions le nombre de décès prématurés causés dans le monde par la pollution ambiante (de l’air extérieur) dans les zones urbaines et rurales; cette mortalité est due à l’exposition aux particules d’un diamètre de 2,5 microns ou moins (PM2,5, qui provoquent des maladies cardiovasculaires et respiratoires, et des cancers.
Les personnes vivant dans les pays à revenu faible ou moyen payent un tribut disproportionné à la pollution de l’air extérieur: 91% (des 4,2 millions de décès prématurés qui lui sont dus) surviennent dans ces pays, les Régions de l’Asie du Sud-Est et du Pacifique occidental supportant le plus lourd fardeau.
On retrouve dans les dernières estimations de la charge de morbidité le rôle important joué par la pollution de l’air dans les maladies cardiovasculaires et les décès. On dispose de plus en plus de faits démontrant les liens entre la pollution de l’air ambiant et le risque cardiovasculaire, dont des études dans des zones très polluées.
L’OMS estime qu’environ 58% des décès prématurés liés à la pollution de l’air extérieur résultaient en 2016 de cardiopathies ischémiques et d’accidents vasculaires cérébraux, 18% de bronchopneumopathies chroniques obstructives ou d’infections aiguës des voies respiratoires inférieures, tandis que les 6% restants sont imputables au cancer du poumon.
Les conclusions d’une évaluation menée en 2013 par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l’OMS ont montré que la pollution de l’air extérieur était carcinogène, les matières particulaires étant le polluant associé le plus étroitement à une incidence accrue de cancers, en particulier du poumon. Un lien a également été établi entre la pollution atmosphérique et l’augmentation du nombre de cancers des voies urinaires/de la vessie.
Pour protéger la santé publique, il est essentiel de lutter contre tous les facteurs de risques de maladies non transmissibles, parmi lesquels la pollution de l’air.
La plupart des sources de pollution de l’air extérieur échappent totalement au contrôle des individus et nécessitent une action concertée au niveau local, national et régional des responsables des secteurs des transports, de l'énergie, de la gestion des déchets, de l'urbanisme et de l'agriculture.
On trouve de nombreux exemples de politiques qui sont parvenues à réduire la pollution de l’air, dans les domaines des transports, de l’urbanisme, de la production d’électricité et de l’industrie:
- industrie: promouvoir les technologies non polluantes qui limitent les émissions de cheminées industrielles; et la gestion améliorée des déchets urbains et agricoles, y compris par l’ouverture de sites de captage du méthane provenant des déchets (à utiliser comme biogaz), en tant que solution de rechange à l’incinération;
- énergie: garantir l’accès à des solutions propres et financièrement abordables pour la cuisine, le chauffage et l’éclairage;
- transports: effectuer la transition vers des modes de production d’électricité non polluante; favoriser les transports publics rapides, la marche et les pistes cyclables dans les villes, ainsi que le transport interurbain des marchandises et des passagers; utiliser en priorité des véhicules diesel à usage industriel plus écologiques, ainsi que des véhicules et des carburants à faible émission, notamment des carburants à faible teneur en soufre;
- urbanisme: améliorer le rendement énergétique des bâtiments; rendre les villes plus vertes, plus ces, et donc plus économes en énergie;
- production d’électricité: généraliser l’utilisation de combustibles à faible émission et de sources d’énergie renouvelables ne nécessitant aucune combustion (par exemple solaire, éolienne ou hydroélectrique); promouvoir la cogénération de chaleur et d’électricité; et favoriser la production d’énergie décentralisée (par exemple à l’aide de miniréseaux ou de panneaux solaires de toiture);
- gestion des déchets urbains et agricoles: mettre en œuvre des stratégies de réduction, de séparation, de recyclage, de réutilisation et de retraitement des déchets; les méthodes améliorées de gestion biologique des déchets, comme la digestion anaérobie des déchets afin de produire du biogaz, représentent des solutions alternatives à l’incinération de déchets solides en plein air tout en étant d’un coût abordable. Quand on ne peut en faire l’économie, l’incinération de déchets doit impérativement reposer sur des technologies de combustion associées à des contrôles stricts des émissions.
Outre la pollution de l’air extérieur, la fumée domestique à l'intérieur des habitations représente un grave risque sanitaire pour environ 3 milliards de personnes qui font cuire leurs aliments et chauffent leur logement à l’aide de combustibles à base de biomasse et de charbon. On estime que la pollution de l’air à l’intérieur des habitations était responsable de 3,8 millions de décès prématurés en 2016. Ce fardeau est principalement porté par les pays à revenu faible ou intermédiaire. La pollution de l'air à l'intérieur des habitations est également une source majeure de pollution de l'air extérieur dans les zones urbaines et rurales.
Les Lignes directrices OMS relatives à la qualité de l’air de 2005 présentent des recommandations d’ordre général concernant les valeurs seuils des principaux polluants de l’air qui posent des risques de santé. Il y est indiqué qu’on peut diminuer de 15% environ la mortalité imputable à la pollution de l’air en réduisant la pollution par les matières particulaires PM10 de 70 à 20 microgrammes par mètre cube.
Ces lignes directrices sont applicables dans le monde entier et se fondent sur l’analyse par des experts de données scientifiques contemporaines récoltées dans toutes les Régions de l’OMS concernant:
- les matières particulaires (PM);
- l’ozone (O3);
- le dioxyde d’azote (NO2); et
- le dioxyde de soufre (SO2).
Ces recommandations sont en cours de révision; la nouvelle version devrait être publiée en 2020.
Matières particulaires
Définition et principales sources
Les matières particulières sont un indicateur indirect courant de la pollution de l’air. Elles affectent plus de personnes que n’importe quel autre polluant. Les principaux composants en sont les sulfates, les nitrates, l’ammoniaque, le chlorure de sodium, le carbone, les matières minérales et l’eau. Elles sont formées d’un mélange complexe de particules solides et liquides de substances organiques et minérales en suspension dans l’air.
Si les particules d’un diamètre n’excédant pas 10 μ (≤ PM10) peuvent pénétrer et se loger profondément à l’intérieur des poumons, celles dont le diamètre est inférieur ou égal à 2,5 μ (≤ PM2.5) sont encore plus nocives pour la santé. Elles peuvent franchir la barrière pulmonaire et entrer dans la circulation sanguine. L’exposition chronique aux particules contribue au risque de développer des maladies cardiovasculaires, respiratoires et des cancers pulmonaires.
Effets sur la santé
Il existe un lien étroit et quantitatif entre l’exposition à des concentrations élevées en particules (PM10 et PM10 et PM2,5 ) et un accroissement des taux de mortalité et de morbidité, au quotidien aussi bien qu’à plus long terme. De même, la mortalité liée à une telle exposition baisse à mesure que les concentrations en petites et fines particules sont réduites, en supposant que les autres facteurs restent inchangés. Un tel rapport permet aux décideurs de projeter dans quelle mesure réduire la pollution de l’air aux particules pourrait bénéficier à la santé de la population.Même à faible concentration, la pollution aux petites particules a une incidence sanitaire; en effet, on n’a identifié aucun seuil au-dessous duquel elle n’affecte en rien la santé. C’est pourquoi il était préconisé dans les lignes directrices de 2005 d’œuvrer à limiter au maximum les niveaux de concentration en particules en suspension.
Valeurs recommandées
Matières particulaires fines (PM2.5)
10 μg/m3 moyenne annuelle25 μg/m3 moyenne sur 24 heures
Matières particulaires grossières (PM10)
20 μg/m3 moyenne annuelle50 μg/m3 moyenne sur 24 heures
Outre les valeurs recommandées, les lignes directrices établissent des cibles intermédiaires pour la teneur en PM10 et PM2,5, en vue de favoriser une transition progressive vers des concentrations réduites.
Si elles étaient atteintes, il est probable que ces cibles entraîneraient d’importantes réductions des risques d’affections aiguës et chroniques dues à la pollution de l’air. Les valeurs préconisées dans les lignes directrices constituent cependant l’objectif à atteindre.
Les particules en suspension produisent sur la santé des effets qui peuvent être observés à des niveaux d’exposition auxquels un grand nombre de personnes est soumis dans les zones urbaines et rurales des pays développés et en développement; on note toutefois que les niveaux d’exposition sont souvent nettement plus élevés dans les villes qui se développent rapidement que dans des villes déjà développées d’une taille comparable.
Selon les Lignes directrices OMS relatives à la qualité de l’air, abaisser la concentration moyenne annuelle en particules fines PM2,5 de 35 µg/m3, un niveau communément enregistré dans nombre de villes en développement, à 10 µg/m3, soit le niveau préconisé par l’OMS, pourrait réduire le taux de mortalité lié à la pollution de l’air d’environ 15%. Néanmoins, même dans l’Union européenne, où un grand nombre de villes observent les limites recommandées par l’Organisation, on estime que l’espérance de vie moyenne est amputée de 8,6 mois en raison de l’exposition de la population aux particules fines issues de l’activité humaine.
Dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, l’exposition aux polluants à l’intérieur des habitations, rejetés lors de l’utilisation domestique de combustibles polluants dans des foyers ouverts ou des poêles traditionnels, augmente le risque d’infection aiguë des voies respiratoires inférieures, de maladie cardiovasculaire, de bronchopneumopathie chronique obstructive et de cancer du poumon chez l’adulte.
On associe d’importants risques sanitaires à l’exposition aux particules fines, mais aussi à l’ozone (O3), au dioxyde d’azote (NO2) et au dioxyde de soufre (SO2). Comme c’est le cas pour les particules, les concentrations de ces molécules sont généralement plus importantes dans les zones urbaines des pays à revenu faible ou intermédiaire. L’ozone est l’un des principaux facteurs de risque de morbidité et de mortalité liées à l’asthme, le dioxyde d’azote et le dioxyde de soufre ayant, quant à eux, une incidence sur l’asthme, les affections bronchiques, les inflammations pulmonaires et l’altération des fonctions pulmonaires.
Ozone (O3)
Valeurs recommandées
O3
100 μg/m3 moyenne sur 8 heures
Sur la base de liens récemment établis entre la mortalité journalière et la concentration d’ozone dans l’air, la valeur seuil d’ozone préconisée dans les Lignes directrices OMS relatives à la qualité de l’air a été abaissée par rapport à celle des éditions précédentes qui s’élevait à 120 µg/m3.
Définition et principales sources
Il ne faut pas confondre l'ozone de la couche protectrice dans la haute atmosphère avec celui qui l'on retrouve au niveau du sol et qui est l'un des principaux constituants du smog photochimique. Dans ce cas, l'ozone se forme sous l'effet de réactions photochimiques (c'est-à-dire en présence du rayonnement solaire) entre divers polluants, comme les oxydes d'azote (NOx) émis par les véhicules et l'industrie et les composés organiques volatiles (COV), émis par les véhicules, les solvants et l'industrie. On observe des pics de concentration pendant les périodes de temps ensoleillé.Effets sur la santé
À des concentrations trop élevées, l'ozone a des effets marqués sur la santé de l'homme. On observe alors des problèmes respiratoires, le déclenchement de crises d'asthme, une diminution de la fonction pulmonaire et l'apparition de maladies respiratoires.Dioxyde d’azote (NO2)
Valeurs recommandées
NO2
40 μg/m3 moyenne annuelle
200 μg/m3 moyenne horaire
La valeur guide actuelle de l'OMS de 40 μg/m3 (moyenne annuelle), a été fixée pour protéger le public des effets du NO2 gazeux sur la santé.
Définition et principales sources
Dans l'air, le NO2 a les effets suivants:- À des concentrations dépassant 200 μg/m3, sur de courtes durées, c'est un gaz toxique entraînant une inflammation importante des voies respiratoires.
- C'est le principal agent responsable de la formation des aérosols de nitrates, qui représentent une proportion importante des PM2.5 et d'ozone, en présence de rayons ultraviolets.
Les émissions anthropiques de NO2 proviennent principalement de la combustion (chauffage, production d'électricité, moteurs des véhicules automobiles et des bateaux).
Effets sur la santé
Les études épidémiologiques ont montré que les symptômes bronchitiques chez l'enfant asthmatique augmentent avec une exposition de longue durée au NO2. On associe également une diminution de la fonction pulmonaire aux concentrations actuellement mesurées (ou observées) dans les villes d'Europe et d'Amérique du Nord.Dioxyde de soufre (SO2)
Valeurs recommandées
SO2
20 μg/m3 moyenne sur 24 heures
500 μg/m3 moyenne sur 10 minutes
La concentration de SO2 ne doit pas dépasser 500 μg/m3 en moyenne sur 10 minutes. Selon certaines études, une proportion d'asthmatiques voient leur fonction pulmonaire s'altérer et des symptômes respiratoires apparaître après une exposition au SO2 de seulement 10 minutes.
- On sait maintenant que le SO2 a des effets sur la santé à des concentrations bien plus faibles qu'on ne le soupçonnait auparavant.
- Il faut s'en protéger davantage.
- Bien que l'on ne connaisse pas encore exactement la cause des effets du SO2 à de faibles concentrations, il est probable qu'en abaissant celles-ci on obtiendra aussi une réduction de l'exposition aux polluants associés.
Définition et principales sources
Le SO2 est un gaz incolore, d'odeur piquante. Il est produit par la combustion des énergies fossiles (charbon et pétrole) et la fonte des minerais de fer contenant du soufre. La source anthropique principale de SO2 est la combustion des énergies fossiles contenant du soufre pour le chauffage domestique, la production d'électricité ou les véhicules à moteur.Effets sur la santé
Le SO2 affecte le système respiratoire, le fonctionnement des poumons et il provoque des irritations oculaires. L'inflammation de l'appareil respiratoire entraîne de la toux, une production de mucus, une exacerbation de l'asthme, des bronchites chroniques et une sensibilisation aux infections respiratoires. Le nombre des admissions à l'hôpital pour des cardiopathies et la mortalité augmentent les jours de fortes concentrations en SO2. La réaction avec l'eau produit de l'acide sulfurique, principal composant des pluies acides à l'origine de phénomènes de déforestation.Action de l'OMS
Les États Membres de l’OMS on^t adopté une résolution en 2015 et une feuille de route en 2016 visant à renforcer l’action mondiale contre les effets sanitaires de la pollution de l’air.
L’OMS est l’institution garante pour 3 indicateurs des objectifs de développement durable liés à la pollution :
- 3.9.1 Taux de mortalité attribuable à la pollution de l’air
- 7.1.2 Accès à des carburants et technologies propres
- 11.6.2 Qualité de l’air dans les villes
L’OMS élabore et publie des Lignes directrices relatives à la qualité de l’air dans lesquelles elle préconise des seuils d’exposition aux principaux polluants de l’air (à l'intérieur des habitations et à l'extérieur).
L’OMS produit des évaluations détaillées concernant l’incidence sur la santé de différentes sortes de polluants atmosphériques, notamment les particules fines, le carbone noir et l’ozone.
L’OMS compile des données factuelles concernant le lien entre la pollution de l’air et certaines maladies comme les affections cardiovasculaires et respiratoires et les cancers, et élabore des estimations de la charge de morbidité imputable à l’exposition à la pollution atmosphérique existante, aux niveaux mondiall, régional et national.
L’OMS élabore des outils tels que l’AirQ+ pour évaluer les impacts des différents polluants sur la santé, mais aussi l’outil HEAT (Health Economic Assessment Tool: Outil d’évaluation sur la santé et l’économie) pour évaluer les interventions en faveur des piétons et des cyclistes, l’outil Green+ pour renforcer l’importance des espaces verts pour la santé, l’outil STHAT (Sustainable Transport Health Assessment Tool: Outil d’évaluation sur la santé et les transports durables) et l’outil ITHIM (Integrated Transport and Health Impact Modelling: Outil de modélisation intégrée des transports et de l’impact sur la santé).
L’OMS élabore un ensemble d’outil appelé CHEST (Clean Household Energy Solutions Toolkit: Ensemble d’outil pour des solutions d’énergie domestique propre) pour donner aux pays et aux programmes les outils nécessaires pour créer ou évaluer les politiques développant l’accès et le recours aux énergies domestiques propres, un aspect particulièrement important quand on sait que les polluants émis dans les habitations et aux alentours (pollution de l’air intérieur) contribuent de manière importante à la pollution de l’air extérieur.
L’ensemble CHEST comporte des modules sur l’évaluation des besoins, un guide sur les normes et les essais des appareils produisant l’énergie domestique, le contrôle et l’évaluation et des matériels pour donner au secteur de la santé les moyens de combattre la pollution de l’air à l’intérieur des habitations.
L’OMS aide les États Membres à échanger des informations sur les approches et les méthodes permettant d’évaluer l’exposition à la pollution et de suivre ses effets sur la santé.
L’OMS dirige le Groupe spécial conjoint sur les aspects sanitaires de la pollution de l’air au sein de la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance pour évaluer les effets sanitaires de cette pollution et fournir la documentation à l’appui.
L’OMS a coparrainé le Programme paneuropéen pour les transports, la santé et l’environnement, dans le cadre duquel elle a conçu un modèle de coopération régionale multisectorielle entre États Membres, dans le but de limiter la pollution de l’air et d’autres facteurs de risque sanitaires dans le secteur des transports, ainsi que des outils permettant d’évaluer les bienfaits de telles mesures pour la santé.
